La Révolution en Périgord (compléments du chap. 8)

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LE TEMPS DES AFFRONTEMENTS ET LA CHUTE DE PIPAUD (Janvier-Juillet 1793)

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Ce chapitre est chronologiquement le plus court. Les affrontements y sont intenses dès janvier 1793 , puis avec ce qu’on peut qualifier de « première Terreur » en avril-mai et enfin de l’affrontement parisien qui aboutit à la chute des Girondins à Paris (2 juin) puis de Pipaud des Granges à Périgueux le 10 juillet 1793.

Les sources principales sont :

1-les registres

- du Conseil du Département (1L149, 150 (13 janvier-20 mai 1793), 151(21 mai-3 juillet 1793)

- du directoire 1 L 160 ; 1 L 161 (19 décembre 1792- 9 juillet 1793)

2-Les registres des jacobins de Périgueux (13 L 12/4) et de Bergerac : Labroue, La Société populaire de Bergerac (à partir de la page 215)

3-les registres des districts

En fait le registre principal est le 1L 151 où se retrouvent les affrontements décisifs auxquels de larges citations ont été consacrées.

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Voir notamment la délibération du 1° janvier 1793. Projet de la société de Quimper « pour maintenir l’autorité de la Convention et le respect qui est dû aux Représentants d’un Peuple libre. » Pipaud évoque les troubles qui s’élèvent journellement dans la Convention. Chrétien et Villefumade ont soutenu que la Convention n’est point influencée. Villefumade fait l’éloge de Marat qui avait été inculpé.

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A propos de Pétion et Manuel auxquels la Société avait décerné l’année précédente une couronne civique : la question était très grave au point de conduire Pipaud des Granges à évoquer à la Société le 7 janvier (ADD 13L 12/4) la question de la rupture avec les Jacobins de Paris. Il explique « que les Jacobins viennent de rayer Manuel de leur catalogue « Retirerons-nous la couronne civique à Manuel et Pétion, citoyens vertueux qui méritent notre estime ? Pipaud conclut que s’il était aux Jacobins de Paris, il demanderait les raisons qui ont conduit à exclure Pétion et Manuel . Au cas où ils ne satisferaient pas à cette réclamation, que nous rompions avec eux. » On demande donc les procès-verbaux d’exclusion.

Les tribunes (même source) 15 janvier : « Bardet indique aux tribunes que leurs applaudissements sont sans influence parce qu’ici nous faisons la guerre à (ill) et non aux personnes » Ceci semble montrer qu’il pouvait exister un public important et surtout aux idées plus extrêmes que celles des membres. C’est d’autant plus important qu’on souligne souvent le petit nombre de ceux-ci très loin des centaines de membres dont Labroue crédite la Société de Bergerac dans son texte introductif à la transcription des délibérations.

24 janvier : (même source) Bruit occasionné par les enfants. Les citoyens des tribunes sont invités à dénoncer à la municipalité les jeunes gens qui pourraient y causer du trouble, afin qu’elle les moyens de la prévenir ; qu’il sera assigné un endroit particulier pour les enfants qui pourraient venir s’instruire par des discussions qui s’ouvrent chaque jour dans les séances de la Société.

ADD 1 L 159 13 janvier : déclaration de Pipaud des Granges « Le Procureur Général déclare que le grand objet de ses (du Conseil général) délibérations et de sa sollicitude devait être de considérer les dangers qui semblent menacer la Convention Nationale et qu’il importait de les prévenir en l’entourant d’une force départementale. »

MOULIN (13 L 12/4, 6 janvier) demande à la Convention « de se transporter dans une ville qui n’excède pas 40000 habitants…Elle est par la constitution libre de choisir le lieu de ses délibérations ».C’est dans ce même discours qu’il assimile d’Orléans à Cromwell. A noter à ce sujet les fréquentes références à l’Angleterre du XVII° siècle.

Pontard, Le 5 janvier (même source) « il affirme que les massacres commencés le 1°septembre durèrent 6 ou 7 jours sans que la Convention (rappelons qu’elle se réunit le 21 septembre seulement) ni les autorités constituées ne puissent arrêter le cours jusqu’à ce qu’il plût aux factieux de cesser d’agiter le peuple . Il faut voler à son secours ». Rappelons que Pontard était présent à Paris en septembre 1792 où il aurait sauvé Ponte d’Albaret (chapitre 7).

La proposition copiée sur celle du girondin Lasource est formulée le 6 janvier (même source) et elle est formulée par Claverie qui propose d’envoyer des citoyens de tous les départements pour occuper dans les tribunes les places qui leur sont dues et que les Parisiens n’en occupent que…la 84°partie. Envoyer pour cela 20 bons citoyens.

6 janvier (même source) Chrétien s’étonne «que les orateurs précédents craignent du danger du moment qu’ils reconnaissent que la masse des citoyens de Paris étaient l’armée et la protectrice de la liberté »

A noter la conclusion de cette séance : la mise aux voix de 2 questions

1°La Convention est –elle libre de ses délibération ? Non à l’unanimité. Desmaisons propose un courrier extraordinaire à la Convention pour lui apporter une adresse telle que le préalable mis aux voix. Il a été arrêté que le courrier lui serait envoyé pour porter une adresse. Sirey pour la porter. Souscription de 600 livres

2°un registre ouvert pour la formation de la force armée et ne seront admis que les citoyens porteurs d’un certificat de civisme »

Conseil général 10 janvier (ADD 1 L 149)

Deux opinions se présentent : former sur le champ une force armée de 3 à 400 hommes et prévenir par une adresse à la Convention Nationale que ces défenseurs vont voler à son secours pour faire respecter les lois et la souveraineté du peuple et ses représentants ; l’autre qu’il suffisait d’annoncer à la Convention nationale le vœu du département et de se tenir prêt à agir au 1° signal.

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-Société : 6 janvier : voir ci-dessus

-1 L 150 : 14 janvier 1793

-1 L 15 : 6 janvier 1793

1 L 150 14 janvier 1793. Conseil général Rapport sur la formation d’une force départementale. Articles mis en discussion approuvés à l’unanimité « Il sera levé dans le département une force appelée départementale pour se rendre à Paris d’après les ordres de la Convention 2°Tous les citoyens en âge de porter les armes seront admis à la composer et qu’ils seront au moins d’une taille de 5 pieds 2 pouces (note : le pied fait autour de 30 cm, le pouce un peu moins de 3)

1 L 150 : 17 janvier Conseil général : Lettre des députés du département annonçant qu’à séance du 11 la décision sur la force départementale a été ajournée après le jugement de Capet

13 L 12/4 séance du jeudi 17 janvier. A noter qu’on lut ce jour là une lettre du modéré Meynard estimant que ce serait « imprudent ou au moins inutile ». C’est ensuite Lavergne qui ouvrit le feu  en triomphant « la Convention est libre et en sûreté. L’adresse doit être retirée que les mauvais citoyens soient exclus de notre société ». On décide aussi que Sirey sera rappelé

ADD 1 L 150 , 18 janvier. Longue délibération du Conseil sur la plainte de Villefumade et contre-attaque de Pipaud des Granges. On notera qu’il s’agit de la première attaque du parti « montagnard » contre lui . Les adversaires montagnards de l’adresse entendaient récolter les fruits de leur victoire de la veille. La sûreté de Pipaud dans la demande qu’il formula de l’examen de ses faits et gestes prouve qu’il tenait bien en mains le Conseil général et la Société. En revanche pour le district contrairement à ce que j’ai écrit c’était bien moins sûr, le distrct semblant évoluer comme il l’a fait depuis 1790 vers des positions plus avancées.

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13 L 12/4 24 janvier Lettre de Sirey qui donne des détails sur la Convention et les intrigues de Paris. Bardon a observé que cette épitre n’était qu’une amphibologie soutenue ;

Pipaud 1 L 161, 24 janvier

A propos de Danton 13 L 12, 27 janvier « Lettre de Sirey sur la mort de Pelletier et ce qui se passe à l’assemblée notamment à propos de Danton ». Pour les extraits suivants, même source aux dates indiquées

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Les débats en 13 L 12-4 à la date du 9 février montrent l’embarras des jacobins modérés face à la question Pétion-Manuel. Elle est aussi caractéristique de l’attitude des Périgourdins vis-à-vis de la « Mère société » quitte à se renier. D’où l’attitude repli de Pipaud des Granges

La lettre de Lamarque dans les délibérations à la date du 20 février (annexe 1) et la réponse de Sudret. Là encore la violence des propos de Lamarque est un tournant dans les relations avec un homme qui avait été proche de Pipaud même s’il s’était toujours situé à sa gauche. Cette lettre est un témoignage de l’écart qui s’est creusé avec Paris

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Bergerac

H Labroue, La Société populaire de Bergerac, P215 les analyses des lettres de Pinet pendant le procès du roi ; : 16 décembre « pour paralyser la liberté de la Convention les partisans du Roi envahissent les tribunes » ce qui est une opinion ! Son adhésion très ferme aux positions montagnardes le 11 janvier où il s’exclame « il n’y siège pas des cannibales mais des hommes libres et patriotes ».Il exprime aussi ses réserves vis-à-vis de Marat le 26 décembre « Que les départements ne soient pas dupes de ceux qui feignent d’identifier les patriotes avec Marat ». Réponse des Bergeracois p 216-17 montre un état d’esprit très différent. Leurs plaintes sur les inégalités sont révélatrices d’une évolution « Pourquoi faut-il que jusqu’à présent, les bienfaits de la Révolution n’aient porté que sur les riches propriétaires et négociants…Toutes les lois nouvelles semblaient avoir pour but le soulagement du pauvre, l’amélioration du sort du cultivateur et de l’artisan…tous ceux-ci se trouvent au contraire accablés par le poids énorme des impositions qui pèsent sur eux et par le prix excessif des subsistances Il ne se présente qu’une consolation : c’est le changement de cet état de choses que de bonnes lois doivent nécessairement opérer.

Sur l’affaire du tribunal de Terrasson/Montignac : délibérations du directoire 1 L 159-160 (décembre 1792-janvier 1793)

Sur la levée de 300 000 hommes, ADD 1L 159 : 3 mars 1792. Plus généralement et pour l’ensemble de la période, voir GRENIER de CARDENAL (L de) Recrutement de l’armée en Périgord durant la période révolutionnaire(1789-1800), Périgueux, Joucla, 1911

Bergerac, Labroue, Société populaire… délibération du 5 mars p 226 : « déjà quelques uns des citoyens sont partis de Bergerac pour se soustraire à cette levée. Pasqual propose d’écrire à la Société de Bordeaux, lieu de leur refuge pour les y dénoncer »

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Sur le recrutement à Périgueux, ADD E Dep 5206 21 mars 1793. Il y a dans le même dossier les recrutements postérieurs qui se firent cette fois au scrutin et au premier rang des élus figurent les domestiques. Voir en particulier même source, 14 mai 1793.

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Eugène Aubisse, « recrutement révolutionnaire », B.S.H.A.P 64, 1937 p 282

Nontron. A noter que l’écho de l’enthousiasme de la ville de Nontron jusqu’à Bergerac : Lecture d’une adresse du procureur-syndic de Nontron au procureur général-syndic par lequel il lui annonce que la commune de Nontron a rempli dans une demi-heure le contingent qui lui était fixé et espère en fournir un nombre plus considérable (Labroue, Société populaire… p 232-233). Il est aussi question des mauvais citoyens qui ont été arrêtés à Périgueux. S’agit-il des « déserteurs » dénoncés ci-dessus ?

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Sur les événements de Nontron : voir Annexe 1

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Le Tribunal criminel  et révolutionnaire de la Dordogne sous la Terreur, Périgueux, Cassard, 1880-81. Trois affaires concernent le recrutement : 1°affaire, « Troubles dans la commune de Siorac à l’occasion du décret du 21 février » p 16 ; 4°affaire «  Emeutes contre-révolutionnaires dans le Haut-Montravel » p 82 ; 9°affaire « troubles dans la commune de Notre-Dame-Des vertus ; abattage d’un arbre de la Liberté » p 180.

La Vendée :

Les délibérations de deux districts soulignent l’angoisse que fait naître le soulèvement de la Vendée et les conséquences pour le département de la Dordogne

1- Montignac ADD 5 L 5 20 mars 1793

« Citoyens, nous avons juré souvent de vivre libres ou de mourir. Le moment de réaliser nos serments est arrivé. Une armée composée d’émigrés, de prêtres réfractaires et de leurs lâches adhérents parcourent le département de la Vendée et des Deux-Sèvres et menace de se porter sur le département de la Dordogne après avoir traversé celui de la Charente. Déjà plusieurs districts sont dévastés et les villes saccagées ne présentent plus que des ruines »

2 Voir aussi sur la Vendée l’émotion à Nontron dont la proximité avec le Charente peut expliquer l’inquiétude (annexe 2)

Mobilisation à Périgueux, 20 mars ADD I L 159

Périgueux : 13 L 12/4 19 mars Dupont s’élève avec force contre la lenteur des gardes nationales qui temporisent pour porter secours à nos frères des départements dont on a reçu des nouvelles affligeantes. Il demande à se présenter sans plus attendre et partir demain…un soldat se plaint de la lenteur des Périgourdins.

A noter qu’au même moment se pose la question de l’enrôlement des femmes (19mars) : Une citoyenne des tribunes propose de lever un régiment de femmes, motion développée par Lanxade qui a prouvé le courage des femmes enrégimentées et propose un comité de 4 membres qui organiseront les femmes en troupes armées de pique » Cette question sera développée dans un article à venir « Femmes et Révolution en Dordogne » de Mémoire de la Dordogne éditée par les Archives départementales

Lanxade : voir par exemple ADD 13 L 12 : 17 avril sa tirade contre les ministres qui montre clairement dans quel camp il se situait.

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ADD 1 L 160

L’arrivée des représentants en mission est accompagnée d’une proclamation de la Convention transcrite le 5 avril « au nombre des mesures qui lui ont parues les plus essentielles elle a compté l’envoi de commissaires dans tous les départements chargés non seulement d’accélérer le recrutement mais surtout d’étudier l’esprit public, d’en favoriser le développement et les progrès et d’apporter sur tous les points de la République, la lumière et le progrès » Cette proclamation attaque surtout la modération « de tous les penchants du cœur humain le plus actif …c’est l’amour propre ; nous le portons au dedans de nous sans presque nous en apercevoir et nous le déguisons sous le beau nom de modération…Si cette modération ne tendait qu’à favoriser les ennemis du bien public et à user envers eux d’une indulgence que la raison désavoue, que le salut public condamne contre laquelle l’humanité s’indigne puisque ce serait livrer le bon citoyen à la rage des méchants, cette modération, si elle n’était point le produit de l’erreur serait un crime »

Les représentants en mission : Leur arrivée est saluée par la Société le 1°avril dans le plus grand enthousiasme. Saint-André s’exprime contre les demi-mesures et ces lois d’une douceur philosophique excellente en temps de paix mais funestes et mortelles en temps orageux de la révolution..Lui et son collègue laisseront tomber les têtes s’il le faut pour l’affirmation de la liberté »

2 avril :A propos de Roland, Saint-André critique l’idolâtrie pour un individu quel qu’il soit et développe les funestes effets du ministère de cet homme qui a égaré l’esprit public et été l’instrument d’une faction d’ambitieux. On sait combien la Société avait montré son attachement pour Roland, à commencer par Pipaud des Granges.

A partir du 1° avril, le Conseil d’administration qui avait cessé sa permanence le 2 février la reprend. Il dénonce aussitôt(ADD 1 L 150) les ennemis intérieurs et extérieurs. A noter la lenteur avec laquelle les administrateurs rejoignirent ce qui prouvent que les proclamations des représentants en mission n’impressionnaient pas exagérément !

Première terreur

Le 5 avril, (même source) la proclamation par les représentants en mission : ADD 1 L 150

Convaincus par un grand nombre de faits dont l’exposé a été mis sous nos yeux qu’une explosion violente est sur le point d’éclater dans différents districts…Que des rassemblements nombreux de ci-devants nobles, de prêtres réfractaires et autres conjurés se forment clandestinement dans des châteaux isolés où il paraît constant qu’il existe des armes et munitions de bouche Que des propos échappés à des hommes justement suspects de participer à ces complots ajoutent à l’évidence des preuves déjà recueillies…Et ne peuvent pas laisser lieu de douter que la Dordogne en devînt bientôt le théâtre sanglant de la rébellion et des mouvements les plus dangereux pour la sûreté générale 1°Il sera fait un désarmement général de tous les citoyens suspects dans l’étendue du département comme ci-devant nobles, prêtre non-assermentés parents des émigrés et autres dont le civisme ne serait pas notoirement connu 2° comme il importe que cette mesure soit confiée à des citoyens qui réunissent fermeté et intelligence, ce désarmement sera fait par des commissaires.

ADD 1 L 161 Le 7 avril était présenté un arrêté « Contre les ci-devant nobles et les ci-devant privilégiés et les parents d’émigrés ainsi que leurs agents et domestiques ; les prêtres fonctionnaires non assermentés…tous les citoyens enfin notoirement suspects seront arrêtés dans tout l’étendue du département et traduits au chef-lieu du district dans une maison de réclusion que le district désignera ».

Dans la rafale de proclamations adressées par la Convention et relatives au salut public celle du 6 avril proclamait (ADD 1 L 150) : « saisissez tous les hommes en qui vous n’avez point aperçu des sentiments civiques bien prononcés qu’ils soient conduits au plus tôt dans les maisons d’arrêt ».

Guillotine, ADD 1 L 150, 11 avril

Placards (1 L 150, 13 avril ) « Un placard affreux a été trouvé sur les murs de la maison de réclusion .La Société républicaine a été révoltée que le meurtre des détenus fût provoqué dans cette affiche »

Commission,id 12 avril

Idem 16 avril : En présence d’Elie Lacoste On observe « qu’en conséquence des mesures de sûreté prescrites tant par loi que les proclamations des Commissaires de la Convention que par l’arrêté du Conseil Général du 7, plusieurs personnes, même des vieillards, des infirmes et des cultivateurs, des femmes, des mères de famille ont été mises en état d’arrestation et consignées dans leur maison sous prétexte qu’elles n’allaient pas à la messe des prêtres constitutionnels et autres motifs qui prouvent plutôt la faiblesse et l’égarement de ces personnes que leur incivisme et leur malveillance qu’il s’ensuivrait qu’une mesure commandée par le service public deviendrait dangereuse et oppressive. On nomme 2 nouveaux commissaires par district pour s’informer sur les motifs de détention. Ils enverront au directoire qui transmettra au procureur -général-syndic pour rapport. »

Interrogatoires du Comité ADD 12 L 94

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1 L 159, 26 avril : légion départementale

  • Vendée : 1 L 159
  • Fontenay prise le 16 mai fut reperdue le 23. Elle suscita une vive émotion a la Société et Sirey dut justifier la conduite des volontaires.
  • 1 L 159 11 mai déclaration Lacoste « La rage, la férocité font des progrès…D’intrépides phalabes ( sic) conduites aux combat par les administrateurs qu’aucun danger ne peut effrayer iront secourir la Vendée »
  • Beaupuy (id) 13 mai « déclare qu’il n’y a que cent volontaires pour la Vendée »
  • Id : 27 mai Annonce de la prise de Fontenay. Il est apparu que la gendarmerie a abandonné son poste.
  • Voir aussi 1°juin :lettre de Dumoulin sur ce qui s’est passé à Fontenay.
  • Compagnie de Montignac : voir le discours de Pipaud des Granges du 24 mai qui fait de l’événement une affaire politique :c’est au nom de l’égalité que les volontaires auraient arraché les girouettes du château. L’instruction est à la date du 25 mai. On notera par ailleurs qu’à la date du 11 mai les recrues de Montignac envoyées à l’armée des Pyrénées avaient été réorientées pour la Vendée ce qui peut expliquer leur mauvaise humeur.

Périgueux foyer d’intoxication : idem 31 mai

Sur les piques, idem, 25 mai

Des recrues se présentent se plaignent de n’être par armés et refusent les piques et préfèrent se rendre à leur destination sans armes. Le procureur-général-syndic leur « tient le langage de la loi leur expliquant qu’armés de piques ils ne devaient pas craindre l’ennemi qu’ils devaient chercher à le combattre de près et que ce n’était qu’ainsi en criant sus qu’on pouvait se permettre des victoires. Les recrues ont répondu qu’ils étaient satisfaits et partiraient à l’instant pour se rendre où la victoire les appelait » On notera tout de même ou les fortes vertus de Pipaud dans sa leçon de tactique ou la force très relative de la résistance des soldats.

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Le Conseil général aux Jacobins

L’affaire Remy-Lagrimardie fait l’objet d’un long développement en 1 L 151 qui montre l’état d’opposition entre le Département le corps municipal.

L’affrontement avec Elie Lacoste : St Jean d’Angély ; (1 L 151 26 mai) Discours d’Elie Lacoste contre le fédéralisme. Projet d’emprunt forcé 27 mai. On sait que cet événement fut l’occasion d’une vive attaque de Pinet contre Pipaud des Granges (Labroue,Société populaire…,p 259)

Le 30 mai (même source) Pipaud faisait l’historique de la manière dont les choses s’étaient passées depuis le 4 mai : Réquisitoire concernant les reclus du procureur général syndic

Il fait d’abord état des mesures prises suite à la formation du Comité de sûreté générale le 4 mars  qui, jusqu’au 18 mars, se chargea de recueillir des informations. Avec l’insurrection de la Vendée et la nécessite de s’assurer de tous ceux qui étaient atteints de suspicion. Des citoyens jouissant d’une grande réputation de patriotisme en firent l’état et vous procédâtes aux arrestations. Bientôt les détenus firent des réclamations. Elles trouvèrent l’appui de ceux-là même qui les avaient dénoncés et vous crûtes devoir prononcer des élargissements. Sur ces entre-faits les représentants du peuple arrivèrent …et se firent rendre compte des mesures de sureté générale et blâmèrent l’indulgence dont vous aviez usé envers les reclus. La trahison de Dumouriez s’étant manifestée, ils firent une proclamation portant ces paroles remarquables. Pour l’exécution de ces mesures ils fixèrent des commissaires qui établirent des listes des hommes suspects et procédèrent à leur arrestation…Ces mesures entrainèrent avec elles beaucoup d’arbitraire. Il fut arrêté un grand nombre de personnes ». On décide de règlement de police. Dès ce moment « force de citoyens qui n’avaient épargné aucun effort pour remplir la prison s’empressèrent d’en demander la sortie »…. Dans ce contexte les mesures prises furent sans effet ; trois de ces reclus vaquent dans les rues et rien ne les empêche de répandre leurs manières et de concerter leurs complots…Vous vous êtes vu forcés d’accorder l’élargissement à une foule ». Désormais l’occupation principale devient celle d’entendre ces reclus réclamés par leurs communes

Arrêté 1° Les reclus qui sont dans le chef-lieu des districts seront mis en liberté sous la surveillance de la municipalité du chef-lieu de district. Les conseils généraux de district s’occuperont de juger les reclus en renvoyant ceux contre lesquels il n’y a aucune preuve de condamnation.

3- les reclus de Périgueux devront dans les 2 jours se rendre au chef-lieu de leur district.

4- le procureur général enverra l’état des reclus et les pièces qui auront déterminé leur arrestation.

7- Seront excepté du présent arrêté les personnes qui ont envoyé des secours aux émigrés.

On voit que la volonté de détendre la situation s’accompagnait, une nouvelle fois de la critique des représentants en mission.

Contre Elie Lacoste Il faut ici citer le réquisitoire contre Elie Lacoste (1°juin ADD 1 L 151) parce qu’il montre à la fois les conceptions de Pipaud très légalistes à un moment où la situation pouvait tout justifier ce qui devient de règle en l’An II. On y retrouvera aussi l’éclairage de l’inimitié tenace de Lacoste pour Pipaud et à travers lui de ce qui menaçait les pouvoirs locaux. Car le réquisitoire conduit à qualifier les actes d’Elie Lacoste de dictatoriaux alors même que par ailleurs il a été rappelé à Paris comme beaucoup de ses collègues.

Les motifs les plus purs ne sont pas toujours exempts d’erreur mais celui qui veut le bien doit se rendre à la vérité lorsqu’elle le rappelle dans la voie où il s’est égaré.

Elie Lacoste, représentant du Peuple, un des plus fermes défenseurs de ses droits s’est permis d’y porter atteinte par un acte que je vais vous déférer. La haine des ennemis de la Révolution, la crainte des conséquences funestes de leurs conspirations, lui ont dicté des mesures qui étaient hors de ses pouvoirs et blessent la souveraineté nationale.

Il a, par un arrêté du 26 de ce mois assuré une existence au comité de sûreté générale établi à Excideuil par les autorités constituées jusqu’à ce que la patrie ne soit plus en danger. Il a arrêté qu’aucune autorité autre que la Convention Nationale ne pourra porter aucun empêchement aux opérations de ce comité. Il le travestit en tribunal et lui donnant le pouvoir exprès de délivrer des mandats d’amener et d’arrestation, de décider définitivement sur les pétitions des personnes suspectes et de prendre généralement toutes les mesures de salut public commandées par les circonstances ;

Il n’est pas un point de cet arrêté qui ne viole la souveraineté nationale. Le droit de juger et administrer ne peut appartenir qu’aux élus du peuple qui sont ses représentants dans l’exercice de ses actes de sa souveraineté. Aussi jamais un comité établi par une Société populaire n’a-t-il pu exercer un droit qu’il était impossible aux autorités de lui transmettre parce que celui qu’elles exercent ne lui étant que commis elles ne peuvent en disposer en tout ou en partie.

Les comités, lors même qu’ils ne sont que portion des autorités constituées n’ont d’autre objet que préparer les travaux et de surveillance particulièrement des détails qui échappent aisément dans l’ensemble des opérations qui occupent un corps administratif mais jamais ils n’eurent le droit de prononcer un jugement, jamais ils n’eurent le droit d’attenter à la liberté individuelle

Vous vous rappelez sans doute les réclamations qui s’élevèrent de toutes parts contre le droit attribué au Comité de sureté publique dans le sein de la Convention qui réunit tous les pouvoirs cependant il ne peut user de ce droit que provisoirement et il doit dans les 24h rendre compte des arrestations qu’il a cru devoir faire faire. C’est un Comité de Sécurité public et le comité établi à Excideuil qui n’est qu’un comité de surveillance se trouve revêtu d’un pouvoir dont ne jouissent aucune des autorités constituées.

Le pouvoir express de décerner des mandats d’amener ou d’arrestation, le pouvoir de juger définitivement sans qu’aucune autorité autre que la Convention Nationale puisse porter empêchement à ses opérations ne donne-t-il pas le droit d’exercer le plus cruel despotisme dans les mains de ceux qui voudraient en abuse ?

Quel recours peut mettre à l’abri de ses erreurs ou de ses caprices celui qui s’en trouverait victime ? La Convention sans doute est le foyer de la justice, mais elle doit son temps ses travaux à l’ordre public ; et elle ne peut se charger de la justice distributive. Le tribunal crée par Elie Lacoste est donc absolu et souverain et ceux sur lequel il prononce n’ont d’autre appui que dans la sagesse et l’esprit de justice des hommes qui le composent.

Dès lors cette institution est d’autant plus dangereuse qu’elle sera le comble de la tyrannie dès que les hommes qu’elle revêtit du pouvoir absolu cesseront d’être sages.

Il y a peu de jours que vous entendîtes à la barre ces paroles qui nous été adressées : Nous ne souffrirons jamais un dictateur ni un proconsul.

Citoyens les droits et les procédures étaient au-dessus des lois ils créaient des tribunaux, ils établissaient des juges et les constituaient.

Quel est le résultat de l’arrêté pris par le Représentant du peuple Elie Lacoste ? Je vous laisse citoyens administrateurs à prononcer si ce n’est pas le dictatorat, le proconsulat, je laisse à ces hommes qui l’on appelaient dictateurs à prononcer sur l’acte du Représentant du peuple, mais j’oublie qu’ils ont été constamment prosternés à ses pieds.

Oh sans doute nous mériterions les reproches calomnieux qu’ils ont osé se permettre dans cette enceinte si nous ne nous soulevions contre cet abus de pouvoir avec tout le courage, toute la fermeté, toute l’autorité que nous réunissons. Ah sans doute nous nous assoirions sur le char de la dictature, nous trahirions la confiance qui nous honore si nous ne résistions de toutes nos forces à l’exercice des pouvoirs qui ont été attribués au comité de surveillance d’Excideuil.

Nous ne croyons pas déplaire à Elie Lacoste, nous sommes persuadés que ses intentions sont pures et il applaudira le premier à nos efforts lorsqu’il aura reconnu toute la profondeur de l’abîme qui existait sous les pas de la liberté s’il pensait différemment dès lors et se montrerait ouvertement son ennemi il cesserait d’être digne de notre confiance et de notre estime.

Il verra en parcourant les lois avec nous que rien n’a pu autoriser sa conduite, il était sans pouvoirs, la loi du 30 avril dernier qui lui a été notifiée le 9 les supprime. L’homme sans pouvoirs peut-il donner des pouvoirs et des pouvoirs qui compromettent la liberté individuelle.

Le Comité de surveillance d’Excideuil est converti en tribunal extraordinaire puisqu’on lui a attribué toutes les fonctions des tribunaux. La loi du 15 mai dernier déclare nul et comme non avenu toute création de tribunal extraordinaire fait sans aucune autorisation expresse de la Convention nationale.

Il y a plus. Elie Lacoste revêtu de ses pouvoirs est en contradiction avec la loi. Le décret du 21 mars porte l’établissement dans chaque commune d’un comité  de sûreté. Nous allons vous remettre toute cette loi sous les yeux. Elle déterminera la marche que vous allez nous tracer dans cette circonstance.

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31-mai 2 juin 13 L 12/4

Soldats du Cantal, (juin 1793-ADD 1 L 151) Un citoyen tambour du 3°Bataillon du Cantal se rendant en Vendée a dit que dans plusieurs districts même plusieurs départements il s’était formé des insurrections considérables par une troupe de brigands au nombre d’environ 6000 hommes en armes, que des brigands avaient égorgé plusieurs administrateurs et s’étaient emparés de tout ce qu’ils avaient trouvé dans le pays ; que le département du Cantal s’était levé en entier et avait formé une troupe de 30 000 h et munis de vivres pour 5 à 6jours. On lui a apporté la satisfaction du zèle qu’il apportait à la chose publique. Sur quoy l’un des membres de l’administration voyant les revers éprouvés par les cantons des environs de Cahors a proposé de renvoyer un courrier pour prendre des éclaircissements sur les faits rapportés ; qu’il soit établi des postes de districts en districts pour correspondre plus facilement, qu’il soit envoyé des cavaliers chez chaque membre de l’administration pour les presser de se rendre à leur poste avec autorisation de les sommer et dresser procès verbal de leur motif de refus, a proposé en outre d’inviter les administrateurs de districts du département de nommer un membre pour concourir tous ensemble aux mesures à prendre sur l’état ou se trouve actuellement la République .Proposition 1-Reynaud se rendra à Cahors pour conférer sur ces troubles et de faire parvenir le résultat même par moyen extraordinaire 2°Envoi de cavaliers chez tous les membres absents

Arrêté de la Côte d’Or : (1 L 151 8 juin) : un député du département de la Haute-Vienne remet au président un arrête pris le 30 mai par le département de la Côte d’or sur lequel a délibéré le département de la Haute-Vienne le 5 juin. On lit cet arrêté puis celui de la Côte d’or dont l’article 6 «  La Convention sera instruite que tous les citoyens sont prêts à marcher pour assurer l’exécution de ses décrets, qu’ils tireront vengeance des atteintes qui pourraient être portées à l’inviolabilité des décrets des représentants et à la liberté de leurs opinions qu’ils s’insurgeront contre toute autorité despotique dictatoriale et contre toute suprématie de commune ; que tous les corps constitués s’opposeront à toutes les autorités despotiques par tous les moyens qui seront en leurs pouvoirs » L’arrêté sera présenté à la Convention par les commissaires de chaque département.

A propos du 2 juin (même référence), la transcription du discours de Pipaud des Granges ne compte pas moins de 8 pages du registre.

Réunion des districts, 1 L 151

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13 juin : Fête funèbre Beaupuy en présence de veuves soldats tués en Vendée à l’église de la Cité ornée de différentes espèces de bois représentant les forêts et bois de la Vendée. Discours de Pipaud puis Moulin au nom de la Société populaire. On notera que Pipaud en profitait pour dire ses sentiments envers cette famille que les Montagnards n’hésitaient plus désormais à vilipender.

Un Agenais : 13 L 12-4, 15 juin

Thiviers :1 L 151 et réponse de la Société (13 L 12 17 juin)

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Rejet du maximum

(1 L 151, 27 juin) Représentations faites par une multitude de communes de son territoire qui ont exposé que l’exécution du décret du 4 mai avait entièrement dépourvu leur marché de grain. Vu les délibération de 6 districts (manquent Bergerac, Ribérac et, sans surprise Sarlat)…Que les départements qui ont voulu maintenir cette mesure éprouvent le malheur dans toute son étendue…Considérant que la libre circulation la liberté du commerce, le droit inviolable et sacré d’user à sa volonté de sa propriété sont les seuls moyens de faire naître l’abondance. Considérant que le département de la Dordogne n’a pas la quantité suffisante de grains nécessaires, que celle de 10 000 sacs que le Conseil général avait demandé et obtenu du gouvernement n’a pu parvenir ayant été arrêtée à Nantes par effet de l’insurrection. Que toutes les réclamations pour obtenir de nouveaux secours sont restées sans effet…Arrête que tous les bleds qui seront vendus dans tous les marchés du département de la Dordogne ne seront assujettis à aucune taxe et que tous les marchands et voituriers qui en apporteront ne pourront être troublés ni inquiétés sur le prix qu’ils proposeront sous le prétexte d’aucun maximum.

On trouvera dans le même registre  les appels de Thiviers aux dates 9 juin et 13 juin et on trouvera la question du refus de Sorges d’alimenter le marché de Thiviers, ayant crée le sien propre.

Pour le scénario de la chute de Pipaud, voir annexe 2.


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Annexe 1. Les troubles du recrutement en Nontronnais.

Champniers. La réunion de recrutement avait été interrompu par des métayers au cri de « puisqu'il n'y avait plus de Roi, il ne fallait plus de soldats...Ils ont empêché totalement l'opération commencée par la municipalité. ». Le lendemain, 14, c'est de Javerlhac que venait un refus plus technique : on voulait que fussent déduit du chiffre des volontaires de l'année précédente. Logique à ceci près… qu'ils n'étaient pas partis. On soupçonna des malveillants et l'on ordonna une nouvelle réunion. Celle-ci n'attira pas de nouvelles foules. Le 15 mars, même constat pour Saint-Pardoux-la-Rivière « les citoyens se sont séparés sans avoir conformé l'opération relative à la formation de leur contingent. Or on n'a pas relevé les noms grâce à quoi « il aurait été facile de distinguer les citoyens paisibles d'avec les anarchistes...Les malintentionnés ont circonvenu les citoyens paisibles. » On ordonnait une nouvelle réunion le 18 et l'affaire paraissant plus sérieuse en présence de commissaires et de 2 brigades de gendarmerie. Tout à côté de Saint-Pardoux à Saint Angel, nouvelle alerte annoncée le 17 où cette fois ce sont les officiers municipaux qui ont été exclus de l'assemblée : les citoyens se sont choisis pour présider à l'opération deux citoyens l'un de Saint- Pardoux, l'autre de la Chapelle-Montmoreau. Les résultats sont annulés et une nouvelle réunion annoncée pour le 21 pour effacer cette « une véritable injure aux magistrats du peuple ». A Saint-Saud, on avait eu tout d'abord un cas de figure proche de celui de Sorges : le 14 le contingent avait été rempli « Il a été ramassé une certaine somme pour distribuer aux volontaires qui convinrent de s'assembler le dimanche présent jour pour la partager entre eux ». Mais le jeudi précédent, les voici au bourg où ils déclarent qu'ils ne veulent plus l'argent et se désistent. Probablement une manière de faire monter les enchères! Clairement informé des règles, ils demandent que la municipalité fasse des billets pour convocation le jeudi suivant. A la municipalité qui rechigne ils rétorquent  « de gré ou de force » en ajoutant plusieurs menaces. La municipalité s'incline et fait les billets. Mais on en resta là sur ordre du directoire qui menace les meneurs en cas de nouvelle assemblée.

Le 17 journée fatidique c'est à 9h du soir qu'on se réunit. Revoilà le maire de la commune de Champniers où l'on doit se réunir le lendemain pour recruter les volontaires. Mais, le même jour, dimanche, les jeunes se sont rendus à Saint-Matthieu de l'autre côté de la limite du département avec la Haute-Vienne où, assistant à une réunion de recrutement, « 'ils ont été témoins d'une insurrection totale arrivée dans la commune qui a fait manquer l'opération au point que la gendarmerie présente a été maltraitée, les propriétés violées, la municipalité insultée et obligée de se retirer sans avoir pu parvenir à la tranquillité publique ». Résultat : ceux de Champniers ont décidé d'en faire de même. La menace est telle que l'on décide d'y envoyer le lendemain la gendarmerie prévue pour Saint-Pardoux où l'on enverrait une trentaine d'hommes de la garde nationale de Nontron.

C'est donc un peu inquiets que les deux commissaires de Nontron se rendirent à Saint-Pardoux flanqués de leurs compagnies de laquelle, pour éviter de faire monter la tension, ils se séparèrent en entrant dans le bourg, leur donnant rendez-vous quelque part dans la campagne. A leur inquiétude s'en ajoute une autre : du fait de la présence de perturbateurs de Saint-Pardoux, la réunion de recrutement de Saint-Front a été annulée. Après avoir rencontré le commissaire, ils rejoignent la réunion du maire, une assemblée plus nombreuse que prévu. La veille, on a lu, et dans l'église, l'arrêté du district. Or ce lieu de réunion posait de vrais problèmes dans une commune qui avait récusé le prêtre élu et conservé le réfractaire, intervenant même pour qu'il fût reconnu jusqu'à ce que, le 10 août passé, il fût envoyé en maison de réclusion. Et jusque là le maire avait lu les arrêtés dans l'église. Il ne le faisait plus depuis, précise le réquisitoire du district qui note qu'une trentaine de citoyens ne viennent plus à la messe et que les convoquer pour la lecture d'un document officiel était une provocation vis à vis des autres. La réunion s'était pourtant passée sans accroc signalé.

Le lendemain donc, nos commissaires face à l'assemblée se trouvèrent vite dans l'impasse quand il s'agit de lire les textes officiels, le maire mettant son grain de sel objectant que tout cela serait bien trop long. On passa donc à l'essentiel : quel mode l'assemblée voulait-elle qu'on adoptât pour obtenir le contingent de la commune ? Cette consultation nécessitait un appel préalable des jeunes concernés. Au lieu de celui-ci des clameurs indiquèrent qu'on ne voulait pas partir les uns sans les autres. Au fond, satisfaits les commissaires demandèrent que l'on s'inscrivît. Mais nouvelles huées au cri « que l'arbre de la liberté était planté qu'ils feraient et qu'ils seraient ce qu'ils voudraient ». Brutalement le fils du maire s'enquit de la proximité des gardes nationales prêtes à intervenir. Au lieu d'opiner pour faire tenir calme l'assemblée, le maire dénia. L'autre décida d'aller « avertir ceux qui l'ont envoyé ». Dès lors ce fut le chahut intégral les commissaires, cernés par une foule menaçante dont ils s'extraient comme il peuvent, errent un peu dans la campagne avant de retrouver les gardes nationaux qu'ils dissuadent de toute intervention « leur faisant sentir à quel degré les esprits étaient échauffés et combien cette frénésie s'est communiquée à leurs adhérents des communes voisines que le tocsin allait rassembler et que la prudence nous commandait de nous retirer. » Curieuse utilisation des forces de l'ordre qui en dit long sur la capacité des autorités. Pour comble, sans la moindre gêne, le maire rejoint les commissaires, disant que, responsable de l'ordre( !), il approuvait l'attitude des commissaires et leur prudence. Le maire et son procureur syndic furent destitués dans une affaire qui devait se prolonger jusqu’à la descente de cloches de la paroisse. Les meneurs, pour leur part, avaient décampé.

Quelques jours plus tard, à Romains, commune limitrophe de Saint-Pardoux des habitants menacent les Officiers municipaux et déclarent qu'ils préfèrent soutenir les émigrants plutôt que marcher contre eux. Et près de Champniers, à Saint-Félix- de- Reilhac, le directoire enregistrait le fait que le 16 mars « à l'instigation des factieux qui sont désignés dans le procès-verbal, après s'être mise à menacer tant les commissaires que la municipalité, l'assemblée s'est dissoute après avoir déclaré qu'elle ne voulait nullement voter pour la formation du contingent ».

COMITE DE SURETE GENERALE

24 mars Les citoyens composant les corps constitués réunis en assemblée de Comité de Sûreté générale en conséquence de la lettre reçue du procureur-général-syndic sur la réquisition de la force armée faite par le commissaire près le département de la Gironde. Considérant que les troubles annoncés être dans le département de la Vendée, des Deux- Sèvres et de Mayenne et Loire n'ont point été sus directement par l'administration même par le département de la Dordogne. Considérant qu'il importe beaucoup pour le salut de l'état que les corps constitués sachent le trouble arrivé dans lesdits départements afin de prendre les moyens qu'ils aviseront justes et raisonnables et être continuellement en activité pour éviter la propagation de ces troubles et donner à nos frères d'armes les secours qu'ils pourront demander et que ns pourrons rassembler lors de la réquisition. Considérant que le citoyen Debrégeas accusateur public près le tribunal criminel de Périgueux a été nommé par le département de la Dordogne député près de celui de la Charente afin de se concerter avec l'administration de ce département et voir les moyens à prendre pur assurer des forces aux départements en insurrection. Considérant en outre qu'il est difficile de recevoir des nouvelles du département, que de pareilles insurrections exigent une surveillance continuelle.

Le directoire du district de Nontron ouï le procureur-syndics et de l'avis des corps constitués réunis à lui. Arrête que les citoyens receveurs du droit d'enregistrement se transporteront dans la ville d'Angoulême, confèreront avec l'administration ainsi que le citoyen Debrégeas s'informeront des troubles arrivés en Vendée, Deux-Sèvres, Mayenne. Au cas que les nouvelles qu'ils apprendront à Angoulême ne soyent pas suffisantes lesdits commissaires sont autorisés de se transporter à Niort, Nantes et partout ailleurs où ils le croiront nécessaire y prendre les renseignements qu'ils pourront en instruire l'administration soit par courrier extraordinaire qu'ils peuvent dépêcher que par la voie de la poste ordinaire et de revenir auprès de l'administration le plutôt qu'il sera possible.

ANNEXE 2 : Retour sur la chute du Procureur-général-syndic

Il est intéressant de revenir sur le scénario de la chute de Pipaud des Granges comme procureur général syndic pour compléter ce qui se joue du côté jacobin. De ce côté-là Pipaud était progressivement devenu l’homme à abattre en relais des députés montagnards de la Dordogne avec en première ligne après l’emprisonnement de Lamarque, Peyssard. On a vu comment le club avait retourné l’envoyé d’Agen. Et dès le 11 juillet la condamnation de Pipaud était réglée aux Jacobins. Or sur la plan institutionnel les choses furent moins claires.

L’affaire de la Gironde, fin juin-début juillet 1793, montre en quelque sorte à grande échelle, la stratégie politique de Pipaud des Granges vis-à-vis du mouvement fédéraliste en général et de la Commission populaire de Bordeaux. Le procureur général a été loyal vis-à-vis de la Convention malgré ses fortes réserves sur les journées des 31 mai et 2 juin 1793. Il n’a cessé de manifester son opposition aux choix politiques bordelais mais en conservant vis-à-vis de ses acteurs une attitude d’exhortation et de conciliation. Celle-ci contraste avec la haine qui se manifeste dans le reste du département et crée un courant sur lequel les conventionnels périgourdins hostiles à Pipaud des Granges ont pu s’appuyer dans des conditions que rien ne justifiait et relèvent du règlement de compte: la fraternité n’avait plus la moindre place dans le nouveau climat politique ! Ceci n’exclut nullement de comprendre la hantise parisienne du complot venu de l’intérieur.

Le 24 juin, en réponse à l’appel à la dissidence de la Commission populaire de Salut public de Bordeaux., Pipaud prit une position claire et quelque peu légaliste : le procureur général ne prend pas position sur le fond et s’en tient à considérer que les administrateurs n’avaient pas la légitimité pour répondre à l’appel des Bordelais Le texte ne comporte pas moins de 9 pages et il a été analysé par ailleurs dans l’ouvrage « Une des grandes portions du peuple qui vous avoisine déclare le liberté en péril. Elle vous invite à vous unir et à vous coaliser pour repousser la tyrannie qui cherche à l’opprimer, mais vous n’êtes pas le peuple, vous n’êtes pas les citoyens du département de la Dordogne, Vous en êtes seulement les administrateurs et comme tels, vous ne pouvez le représenter dans ce qui concerne le premier, le plus grand de ses intérêts, vous êtes donc sans puissance comme sans droit pour répondre à la demande qui vous est faite ».

L arrêté du 27 juin rapporte celui du 31 mai sur la Maximum. Il est évident qu’il s’agit d’une manière de reprendre la liberté du Département vis-à-vis d’un principe cher aux sans-culottes parisiens. Il n’y avait pas là de quoi plaire aux Montagnards

Le 29 juin se déroule un épisode décisif : En réponse à la commission populaire de Bordeaux qui demande le passage par la Dordogne de la troupe recrutée pour marcher sur Paris, le Procureur général requiert un refus et contient une exhortation qui condamne sur le fond l’initiative bordelaise. Nous avons-vu comment, fidèle aux principes de souveraineté populaire, Pipaud aurait souhaité organiser une consultation des communes et comment Lanxade et la municipalité de Périgueux lui demandèrent de s’en abstenir au vu des affrontements politiques qui pourraient en résulter. Pipaud s’inclina. IL faut ajouter que cette fois la réponse contenait une condamnation de fond et une exhortation fraternelle à revenir sur cette décision. Et pour conforter cette exhortation était ajoutée une clause circonstancielle sur les subsistances que personne ne contesta.

« Arrête qu’il sera écrit à l’administration du département de la Gironde une lettre dont l’envoi sera fait par courrier extraordinaire à l’effet de lui représenter fraternellement que l’envoi d’une force armée à Paris est illégale ; que cette mesure peut produire les effets les plus funestes à la République et pour les prévenir encore de la situation précaire du département de la Dordogne à l’égard des subsistances, de l’impossibilité affligeante où il se trouve, nous mettrait dans l’impuissance de fournir à la troupe de la Gironde les vivres qui lui seront nécessaires pendant sa marche sur notre territoire.

La Commission envoya ensuite un appel qui, au nom de la fraternité exhortait la Dordogne à la rejoindre. La réponse est là encore aussi claire sur le fond qu’elle se veut fraternelle sur la forme et s’appuie sur la force des liens noués depuis 1789 entre les deux départements et qui contrastait avec les rancoeurs des Périgourdins de l’Ancien Régime vis-à-vis de la ville de l’intendant qui les « opprimait ».

30 juin lettre aux administrateurs du département de la Gironde « Vous ne devez pas douter citoyen combien cette union nous est chère ; mais quelques flatteurs que soient pour nous les embrassements fraternels que les citoyens de la Gironde nous apportent, nous préférons mille fois en être privés et renoncer à une démarche dictée, nous en sommes sûrs par la patriotisme, mais réprouvée par la loi ; et qui, sous quelques rapports qu’on l’envisage peut produire les effets les plus funestes et déchirer la République par le choc des partis et les divisions qu’il fait naître…Faites de nouvelles et sérieuses réflexions, arrêtez vos guerriers et, s’ils sont amoureux de voler à la victoire, qu’ils aillent cueillir des lauriers sur les corps expirants des ennemis de la patrie. C’est là seul que la gloire nous attend ».

Le 1°juillet, dès leur arrivée, Treilhard et Matthieu se rendirent au Conseil général pour rendre hommage à son attitude dans cette affaire, sans s’arrêter beaucoup sur l’évocation des circonstances alimentaires. On ne sera pas sans remarquer l’adhésion aux conséquences des 31 mai et 2 juin, ce qui était aller très loin pour les Périgourdins et surtout pour Pipaud des Granges qui, on l’a vu n’avait pas caché ses sentiments aux sujets de ces événements sur le chemin de la conciliation.

« Nous ne pouvons que louer le civisme et les principes qui animent les administrateurs… après avoir manifesté la satisfaction de la conduite de ce département qu’ils ont eu l’occasion de voir…Tous les membres ont manifesté le même vœu et pour en donner des preuves aux représentants du peuple, l’un des membres a fait lecture de la lettre adressée par l’administration au département de la Gironde relativement à la démarche de la Commission °populaire pour les détourner du funeste projet qu’elle a pris d’envoyer une force armée sur Paris…Qu’elle demande en outre le jugement des 32 membres de la Convention mis en état d’arrestation

3 juillet adresse du Conseil à la Convention « jurant un attachement inébranlable à la liberté, l’égalité à l’indivisibilité de la République et à la Convention nationale »

Pipaud avait beau avoir été ferme et avoir satisfait les Représentants du peuple, ses mots fraternels et surtout l’appel au manque de céréales pour dissuader les Sarladais provoqua une vive réaction des deux principaux districts, Sarlat et Bergerac et une réponse très dure de leur part. Pour eux aucune relation autre que l’hostilité totale n’était possible contre ceux qui attaquaient la Convention. C’est la preuve qu’avaient déjà apporté les élections, la force de l’esprit montagnard en Dordogne et aussi de la sacralisation de la Convention. Sur le fond Pipaud aboutissait au même résultat mais l’hostilité à son égard n’attendait que l’occasion de se manifester.

Réponse du district au Département de Bergerac, 3 juillet « Citoyens, quelle a été notre surprise en lisant dans votre arrêté du 29 juin, le second considérant dans lequel vous faites entrer pour motif de votre non adhésion au passage des Bordelais dans votre ville la pénurie de céréales, la pénurie des grains dont est malheureusement affligé notre département. Où est donc cette fierté républicaine qui doit embraser vos âmes ? Quoi ? Vous manquez de courage pour exprimer vos opinions ou bien, ce que nous ne pouvons croire vous approuveriez au fond de votre cœur la rébellion de quelques administrateurs achetés par l’or de Pitt et de Cobourg ? Cette idée serait trop affligeante pour nous, non vous ne vous couvrirez pas d’une tâche infamante. Nous demandons de faire disparaître le second considérant de votre arrêté ainsi que le dernier membre de la phrase dans lequel vous dîtes que vous préviendrez le département de la Gironde de la situation précaire de votre département à l’égard des subsistance, et de l’impossibilité affligeante ou il se trouverait de pourvoir aux besoins de vos frères et amis ; quoi, vous appelez vos frères et amis des rebelles, les armes à la main, dirigeant leurs pas et leurs coups sur nos frères de Paris, sur la Convention nationale. Pour nous, citoyens, nous ne prodiguons pas ainsi le doux nom de frères. Nos frères et nos amis sont ceux qui veulent la liberté qui la chérissent, qui défendent la République une et indivisible, qui protègent la première des autorités. Si les Bordelais ou autres citoyens égarés passaient sur notre territoire portant le fer et le feu contre nos frères de Paris, contre la Convention nationale, nous volerions au devant d’eux, nous les éclairerions, s’il était possible mais s’ils persistaient dans leur dessein liberticide nous leur défendrions le passage les armes à la main et si nous étions vaincus, ils pourraient piller leur subsistance comme les brigands de la Vendée : nous ne consentirions jamais à nourrir de tels monstres.,

Sarlat (10 L 3, 2 juillet)

Vu un exemplaire de l’arrêté du Conseil général d’administration du département de la Dordogne pris dans la séance du 24 juin dernier avec la réquisition du procureur général syndic , un arrêté de la commission populaire de salut public du département de la Gironde du 14 juin dernier, autre arrêté de la dite commission dudit mois et l’instruction donnée à la commission aux commissaires , envoyés par elle à la commission centrale, le tout imprimé en un seul cahier pour être publié et affiché dans toutes les communes du district.

Le directoire du district de Sarlat déclare qu’il improuve formellement cet arrêté et instruction de la prétendue Commission populaire de Salut Public de la Gironde comme attentatoire à la souveraineté du Peuple et la Représentation nationale et l’amendement faisant partie de l’arrêté du Conseil Général du d’administration département de la Dordogne du24 juin dernier comme contradictoire avec les dispositions principales dudit arrêté et tendant à propager le principe d’anarchie si hautement professés par ladite prétendue Commission. Déclare aussi qu’il improuve le réquisitoire du Procureur général syndic imprimé en tête dudit arrêté, comme celui d’un lâche qui après avoir étayé ce même principe par des réflexions prises des circonstances n’a pu se prononcer lui-même. En conséquence arrête que les exemplaires des arrêtés et instructions seront retirés du bureau des Dépêches pour demeurer séquestrés dans le secrétariat.

Pour Pipaud des Granges cette affaire semblait pourtant close avec l’assentiment des Représentants du peuple et malgré le climat tendu aux Jacobins. Le 8 juillet il recevait l’acte constitutionnel libérateur, pacificateur et éteignant les divisions.

8 juillet Discours Pipaud sur Acte Constitutionnel « C’est le gage sacré de son bonheur et de sa liberté que nous allons présenter au peuple. Dans l’état de révolution où nous sommes, il doit être aussi le terme de toutes nos dissensions. Il doit nous réunir parce que c’est par notre union que nous pourrons ressentir les effets salutaires de cette Constitution et la consolider…Non, citoyens du moment qu’elle sera acceptée il ne reste plus de motifs de division ; tout le passé doit disparaître ; celui-là seul qui y porterait atteinte qui voudrait le blesser deviendrai votre ennemi et mériterait l’animadversion publique.

Sur cette base pouvaient s’organiser les réjouissances dont Pipaud fut un des maîtres d’œuvre. Le 9 juillet était présenté un plan et mode d’exécution de la proclamation de l’acte constitutionnel. L’organisation de la fête qui réunit les autorités constituées regroupa une centaine de personnes conviées à un repas sur la place de la Liberté (Tourny) demandant à chacun d’apporter ses couverts, un plat et un dessert. A la marge est opérée pour le peuple une distribution de pain.

10 juillet réunion de tous les corps constitutionnels et des commissaires Treilhard et Matthieu

Le rideau tomba le 11 juillet. Ce jour-là « Treilhard et Matthieu ont d’abord exposé les motifs qui les avaient engagés à se rendre auprès de l’administration ils ont lu la réponse que leur avait fait le Comité de salut public : Il applaudit à la conduit sur leur territoire. Tout paraissait donc aller pour le mieux. Mais ce satisfecit était suivi de la dénonciation contre Pipaud des Granges. Le Procureur général syndic fait le rapport de la dénonciation qui avait été faite contre lui à la Convention Nationale et au Comité de Sûreté Générale : il a annoncé les faits qui lui étaient imputés.

Mais même les représentants de la Convention qui avaient jusqu’ici soutenu le procureur général hésitaient sur les conclusions à en tirer. «  il (Pipaud) a communiqué l’arrêté dudit comité qui le faisait garder à vue et qui mettait ses papiers sous les scellés et invité l’administration à délibérer sur la question de savoir s’il continuerait ses fonctions : plusieurs membres ayant opiné par l’affirmative, l’un d’eux a demandé qu’il fut référé aux commissaires représentants du peuple, présents à la séance. Sur quoi le citoyen Treilhard a pris la parole et a dit qu’il allait donner son opinion individuelle n’ayant pas conféré avec son collègue et il a observé qu’il pensait que le procureur général devait continuer ses fonctions et à l’appui de son opinion il a donné l’exemple des ministres Clavière, Lebrun et autres qui n’avaient point discontinué l’exercice de leurs fonctions malgré leur arrestation jusqu’à leur remplacement et qu’ensuite le citoyen Matthieu a dit que son opinion était parfaitement conforme à celle des son confrère d’après quoi le conseil général arrête que le citoyen Pipaud continuera ses fonctions, attendu d’ailleurs que dans l’ordre du comité il n’y a rien qui s’y oppose.

12 juillet Courrier extraordinaire : suspension du citoyen Pipaud

Le courrier extraordinaire a fait remise sur le bureau du paquet à l’adresse des citoyens composant le directoire du département de la Dordogne par le ministère de la Justice ; l’ouverture ayant été faite il s’est trouvé contenu un décret de la Convention Nationale numéroté 1301 daté du 9 du courant portant que Pierre-Eléonor Pipaud , Procureur Général de ce Département, est suspendu de ses fonctions, qu’il sera sur le champ mis en état d’arrestation et traduit à la barre de la Convention Nationale pour rendre compte de sa conduite ; que ses papiers seront mis sous scellés et envoyés au Comité de Sûreté Générale de la Convention, lettre datée du même jour signée Gohier ministre de la justice…Art 4 le procureur général sera conduit en poste par un officier de la gendarmerie et deux gendarmes. Et au même instant s’est présenté le citoyen Villefumade, juge de paix de la présente ville qui a exhibé une réquisition qui lui a été faite par le Commissaire National du district de cette ville en vertu de l’ordre reçu du Ministère de la Justice à l’effet des scellés dont s’agit, d’après cela toujours sur les conclusions du substitut du procureur général, le Conseil Général d’administration du département, considérant qu’il ne lui reste qu’à concourir à l’exécution de la susdite loi, rappelant les articles …

Le citoyen Lafleunie, capitaine de gendarmerie, a demandé la parole pour communiquer au Conseil Général d’Administration des dépêches qui lui ont été envoyées par le ministère de la Justice contenant décret de la Convention Nationale du 9 de ce mois portant accusation contre le citoyen Pipeaud (sic), procureur général syndic du département de la Dordogne avec ordre de le traduire à la barre de la Convention nationale… d’après cela il a demandé que pour subvenir aux frais de voyage d’un officier et 2 gendarmes qui accompagneront le citoyen Pipaud il lui soit accordé des fonds sur tel receveur que les administrateurs désigneront…Le Conseil général d’Administration le substitut du procureur général entendu, entendu arrête qu’il sera délivré au citoyen Lafleunie une ordonnance de comptant de la somme de 3000l dont il rendra compte par des états détaillés de ses dépenses qu’auront occasionné ce voyage. Mais au même moment aux Jacobins les montagnards, Debrégeas en tête coupaient court à toutes les débats que tentaient d’ouvrir les amis de Pipaud, Sirey en tête, sur l’attitude à prendre dans cette affaire : leur objectif était atteint.

Mais encore une fois si l’affaire sent le règlement de compte personnel il faut se souvenir du climat politique général et de la hantise de tous ceux qui soutenaient la nouvelle majorité de la Convention en un moment où la situation liée aux menaces intérieures et extérieures était périlleuse. C’est la théorie des « circonstances » qui justifient tout alors que Pipaud avait pris toutes les décisions loyales vis-à-vis de la Convention. Restaient les sentiments dont il avait fait part depuis des mois !

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