« Des fours à pain dans une imprimerie ! » : différence entre les versions
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Les dépendances des locaux de l’Imprimerie Moderne à Périgueux abritent une curiosité : des fours à pain du XIXe siècle. | Les dépendances des locaux de l’Imprimerie Moderne à Périgueux abritent une curiosité : des fours à pain du XIXe siècle. | ||
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C’est une survivance de l’histoire de cette imprimerie. En 1867, des cheminots du P. O. créent une ''boulangerie coopérative des ouvriers et employés du Chemin de fer d’Orléans'' appelée ''La Fraternelle'' dont le siège social se trouve 29, impasse des Jacobins à Périgueux. Elle a pour but « la fabrication et la livraison du pain nécessaire à la consommation des sociétaires et de leurs familles, sans esprit de lucre ni de spéculation »[1]. La livraison se fait à domicile (dans le quartier du Toulon par une carriole tirée par un cheval) ou au siège en échange de jetons de cuivre. Le paiement se fait par retenues sur la paye. | C’est une survivance de l’histoire de cette imprimerie. En 1867, des cheminots du P. O. créent une ''boulangerie coopérative des ouvriers et employés du Chemin de fer d’Orléans'' appelée ''La Fraternelle'' dont le siège social se trouve 29, impasse des Jacobins à Périgueux. Elle a pour but « la fabrication et la livraison du pain nécessaire à la consommation des sociétaires et de leurs familles, sans esprit de lucre ni de spéculation »[1]. La livraison se fait à domicile (dans le quartier du Toulon par une carriole tirée par un cheval) ou au siège en échange de jetons de cuivre. Le paiement se fait par retenues sur la paye. | ||
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En 1926, 591 947 kg de pain ont été fournis à 1744 sociétaires ; le bénéfice de cette année s’est élevé à 10 083,96 F. En 1932, les sociétaires n’étaient plus que 1536 et avaient reçu 544 376 kg de pain. Le bénéfice s’est élevé à 19 388,60 F. | En 1926, 591 947 kg de pain ont été fournis à 1744 sociétaires ; le bénéfice de cette année s’est élevé à 10 083,96 F. En 1932, les sociétaires n’étaient plus que 1536 et avaient reçu 544 376 kg de pain. Le bénéfice s’est élevé à 19 388,60 F. | ||
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En 1919, le monde cheminot est secoué par des grèves. Les luttes politique à Périgueux comme en France sont ardentes : lors des élections municipales de décembre 1919, la liste socialiste (qui comprend plusieurs cheminots) remporte tous les sièges à Périgueux. Au congrès de Tours de 1920, ses membres votent pour l’adhésion à la IIIe Internationale et participent à la formation du parti communiste. | En 1919, le monde cheminot est secoué par des grèves. Les luttes politique à Périgueux comme en France sont ardentes : lors des élections municipales de décembre 1919, la liste socialiste (qui comprend plusieurs cheminots) remporte tous les sièges à Périgueux. Au congrès de Tours de 1920, ses membres votent pour l’adhésion à la IIIe Internationale et participent à la formation du parti communiste. | ||
Dernière version du 14 novembre 2025 à 09:42
Les dépendances des locaux de l’Imprimerie Moderne à Périgueux abritent une curiosité : des fours à pain du XIXe siècle.
Photo 1 : Le bâtiment abritant les fours (photo Schunck)
Photo 2 : Un des fours (photo Schunck)
C’est une survivance de l’histoire de cette imprimerie. En 1867, des cheminots du P. O. créent une boulangerie coopérative des ouvriers et employés du Chemin de fer d’Orléans appelée La Fraternelle dont le siège social se trouve 29, impasse des Jacobins à Périgueux. Elle a pour but « la fabrication et la livraison du pain nécessaire à la consommation des sociétaires et de leurs familles, sans esprit de lucre ni de spéculation »[1]. La livraison se fait à domicile (dans le quartier du Toulon par une carriole tirée par un cheval) ou au siège en échange de jetons de cuivre. Le paiement se fait par retenues sur la paye.
Photo 3 : Un jeton (https://levainbio.com/cb/crebesc/jeton-boulangerie-cooperative-perigueux/)
La boulangerie fonctionne tranquillement tout au long de la fin du XIXe siècle et du début du XXe.
Les Archives départementales conservent les comptes de la boulangerie de 1926 à 1932 (4 M 196).
En 1926, 591 947 kg de pain ont été fournis à 1744 sociétaires ; le bénéfice de cette année s’est élevé à 10 083,96 F. En 1932, les sociétaires n’étaient plus que 1536 et avaient reçu 544 376 kg de pain. Le bénéfice s’est élevé à 19 388,60 F.
En 1919, le monde cheminot est secoué par des grèves. Les luttes politique à Périgueux comme en France sont ardentes : lors des élections municipales de décembre 1919, la liste socialiste (qui comprend plusieurs cheminots) remporte tous les sièges à Périgueux. Au congrès de Tours de 1920, ses membres votent pour l’adhésion à la IIIe Internationale et participent à la formation du parti communiste.
Cette situation influe sur la gestion de la boulangerie : des membres du conseil d’administration et du conseil de surveillance, communistes, mettent en cause le président du conseil d’administration, M. Duc, à qui ils reprochent des « indélicatesses »[2] ; son exclusion est prononcée et le conseil d’administration est en très grande partie formé de communistes.
C’est à cette époque (21 mai 1919) qu’est créée la Coopérative ouvrière d’imprimerie la Prolétarienne, dont le siège se trouve également 29 rue des Jacobins. L’imprimerie est la locataire de la boulangerie.
En octobre 1939, les deux sociétés sont dissoutes conformément au décret du 26 septembre 1939 sur la dissolution des organismes communistes. Mais elles continuent de fonctionner sous la tutelle d’un administrateur-séquestre.
À la Libération, le séquestre est levé et les propriétaires rentrent en possession de leurs biens.
La boulangerie a fonctionné jusqu’au début des années 1970. L’imprimerie, devenue depuis 1959 Imprimerie moderne, rachète les locaux et conserve les quatre fours. Seule la cheminée qui surplombait le bâtiment est supprimée. Mais lors des travaux de réfection consécutifs à la vente d’une partie du bâtiment, les deux fours de cette partie se sont écroulés. Il ne reste plus que ceux de l’imprimerie.
Catherine Schunck (Texte paru dans Mémoire vivante n°72 - mai 2026)
[1] Jean-Serge Eloi, Le monde cheminot à Périgueux, une communauté perdue, éd. Fanlac, 2005
[2] AD 24, 4 M 196